Visite au temple



Portrait Kobo_Daishi Kukai

Portrait de Kūkai), XIVe s., Art Institute of Chicago
wikimedia commons

Kūkai (774-835) était un érudit, un poète et un moine qui a fondé le bouddhisme Shingon au Japon. Le titre posthume de Kōbō Daishi, Grand propagateur de la loi, témoigne de son rayonnement manifeste.
Né dans une famille aristocratique à Zentsū-ji dans la province de Sanuki, aujourd'hui Préfecture de Kagawa. Il a reçu une éducation en lettres chinoises et été mis en contact avec les doctrines bouddhistes, confucéennes et bouddhistes. C'est là qu'il aurait découvert la pratique du bouddhisme ésotérique venu d'Inde via la Chine. Pays dans lequel il put se rendre et recevoir un enseignement approfondi. De cette initiation, que l'on dit brève en raison du décès de son maître, il fit la synthèse à la base de l'école Shingon du bouddhisme qu'il propagea au Japon avec l'accord de l'Empereur Saga.
Dans chacun des 88 temples de Shikoku sont honorés des faits, parfois miraculeux, qu'auraient accompli Kūkai. S'il est difficile de faire la part de réalité et de la légende, il est acquis que Kūkai a été reconnu comme homme recherchant le bien du peuple, malgré sa haute extraction. C'est certainement ce qui le rend si populaire… et assure la pérennité du pèlerinage de Shikoku.

Dans le rituel au temple, la récitation du Hanya Shingyō, sūtra du cœur, tient une place centrale. C'est un résumé en 262 caractères des enseignements du Bouddha. Avant de parvenir au Japon, le moine chinois Hsuan-tsang l'apporta d'Inde à Chang-an, en Chine. Il est utilisé par de nombreuses sectes du Bouddhisme japonais et enseigne le concept de vide qui dirige l'esprit vers l'illumination : « Dans ce monde, tout est impermanent, rien ne dure de manière éternelle. Tout apparaît temporairement et change d'un instant à l'autre. Il n'y a donc pas lieu d'être obsédé pas les biens matériels. En relâchant ma force, je chante le sūtra pour vivre dans le bonheur. »

nakahechichodoyukawa

Oratoire sur le Nakahechi, un des chemins du Kumano Kodo

L'entretien des oratoires le long du pèlerinage est aussi une forme d'osettai, ces dons faits aux visiteurs. Avec le vieillissement de la population et la démographie décroissante, en particulier dans les zones rurales, ces édifices sont en voie de disparition. Les lieux de culte shintō ou bouddhistes vivent des offrandes et le dépeuplement est une préoccupation pour leur préservation ( Guardian 06 Nov 2015).


ossuaire ichinomiyacho

Ossuaire à Takamatsu

Dans l’enceinte d’Ichinomiyaji 一宮寺 (n°83) un bâtiment incurvé de béton et de bois, édifié en 2020, attire l’œil par son élégance. L’intérieur forme une allée qui pourrait rappeler des toriis et débouche sur une paroi translucide sur laquelle se détache un bodhisattva Kannon. Entre les portiques, des alvéoles qui sont autant de niches recouvertes de papier japon pour y déposer les restes et les tablettes mortuaires des familles. Appelé 舎利羅, sharira pour transcrire le sanscrit de « restes », cet « ossuaire », selon le site internet, permet de déposer les cendres et les tablettes mortuaires des êtres chers et des ancêtres et de demander un service commémoratif permanent pour pallier la diminution du taux de natalité, le vieillissement de la population et la nucléarisation des familles. Le tarif, pour 7 ans, est tout de même de 200 000 ¥, soit environ CHF 1 200.
Selon Liza Maronese, l’autrice du Dictionnaire insolite du Japon, “on naît shintoïste et on meurt bouddhiste”, ce résumé indique la permanence d’un fond culturel où la religion ancestrale shintō perdure et coexiste avec la pratique du bouddhisme importé d’Inde via la Chine. Les rites funéraires et l’entretien des stèles sont souvent confiés aux temples. Cette tradition est confirmée ici puisque, adossé au temple, se dresse un important sanctuaire shintō, Tamura-jinja田村神社. De jeunes hommes y répètent un cérémonial, peut-être en vue d’un mariage comme le met en avant la communication de l’institution.