Le journal de l'année du désastre
Auteure de Inconnu à cette adresse, Kressmann Taylor s'est mariée en secondes noces à Florence en 1967. Elle y vit déjà en 1966 et est donc aux premières loges pour vivre les crues de l'Arno, le 3 novembre.
L'auteure se montre condescendante lorsqu'elle traite de l'incurie des autorités italiennes. Alors que le danger est passé, elle attend des actes : "Cette apparente inorganisation est inquiétante. Personne ne peut dire à quoi s'emploient les autorités." (p. 91)– Comment te dire combien j'admire ces gens ? Ils sontextraordinaires. Malgré tout ce qu’ils ont perdu et toutes les épreuves qu'ils traversent, jamais tu ne les entendras se plaindre. [...]Lorsqu’ils ont compris que de l'argent allait venir d'Amérique, « où tout le monde est millionnaire », ces misérables se sont mis à exiger un niveau de vie dont ils n'ont pas même idée et qu'ils n'entreverront jamais; et lorsque ce rêve soudain leur est passé sous le nez, ils ont commencé à hausser le ton et à s’indigner.
p. 195-196
L'impatience de Kressmann Taylor est peut-être due au fait que le retour à la normalité est bien plus lent qu'elle ne l'espère. Toujours est-il que pour décrire cette stagnation, elle est contrainte d'utiliser un vocabulaire étendu et précis notamment pour préciser la viscosité des boues, leur odeur, leur couleur. Ce Journal traduit bien une évolution du décor qui contraste avec la permanence des témoignages du désastre.
Ces assertions stéréotypées sur les Italiens sont par contre très déplaisantes, d'autant plus que l'auteure se montre davantage touchée par les dégâts irrémédiables au patrimoine culturel qu'aux conséquences pour le commun des mortels.Les fées du génie technique ne se sont pas penchées sur le berceau de ce peuple […] L'esprit pratique ne laisse pas seulement à désirer, il est inexistant chez ces gens qui se soucient davantage de l'art et de la douceur de vivre, des bonnes manières, de leur honneur et de leur dignité, ainsi que de la vie de famille – valeurs démodées, sans doute, mais ici solidement enracinées.
P. 119