Le cerveau masculin

Gygax Pascal, Zufferey Sandrine et Gabriel Ute, Le cerveau pense-t-il au masculin ?  Cerveau, langage et représentations sexistes. Paris, Le Robert, Temps de parole, 2021.

Toutes les langues se transforment au fil du temps, mais ces changements sont lents et mettent souvent beaucoup de temps à s'installer complètement. Ces évolutions sont très intéressantes en elles-mêmes à étudier, mais elles le sont tout autant par ce qu'elles révèlent des contextes qui les ont engendrées. En ce qui concerne le masculin et son statut dominant dans la langue, on peut facilement s'imaginer que les contextes facilitant ces évolutions ont été des contextes imprégnés d'androcentrisme, voire de misogynie. C'est-à-dire des contextes dans lesquels les hommes étaient non seulement considérés comme plus importants, mais également comme supérieurs.

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Pourquoi la mention du langage inclusif provoque-t-elle autant de débats passionnels ? La norme grammaticale induit une structuration de la société en décalage constant avec la réalité sociale. Les coauteurs mettent en évidence les biais de genre et identifient les règles qui en sont la cause. En inventoriant les pratiques, en français et dans d'autres langues européennes, ils en soulignent les limites.
Cette recherche en psychologie sociale et en psycholinguistique ne prétend pas distinguer le juste du faux. Elle désigne pourtant les éléments qui dérangent : contestation de l'hégémonie masculine corrélée à l'invisibilisation de la femme notamment dans les professions “prestigieuses”. En évoquant une société non binaire, elle souligne un aspect très contesté, souvent identifié à une volonté de renverser l'ordre social.
Les coauteurs rappellent que la langue est en constante évolution et que l'usage est le plus fréquemment en avance sur la norme. En interrogeant notre utilisation de la langue, ils encouragent à adapter notre expression à la réalité vécue tout en essayant d'éviter les mauvaises réponses à de bonnes intentions.

Comme il est relativement difficile de retracer l'origine de l'expression langage inclusif, on en trouve une multitude de définitions. Pour nous, l'expression la plus juste, par rapport à ce que nous venons de dire, serait d'ailleurs langage non exclusif, tant l'utilisation du masculin exclut toutes les personnes qui ne s'identifient pas à la catégorie « homme ». En partant de cette constatation, nous définirons le langage inclusif de manière très large comme « englobant toute forme de langage qui vise à démasculiniser la langue ». Deux types de méthodes entrent dans cette définition : la neutralisation et la reféminisation.

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Les auteurs ont pris soin d'utiliser scrupuleusement un langage inclusif, sans nuire à sa lisibilité. Toutefois, c'est surtout sa nature explicite qui est évidente, d'où une certaine lourdeur didactique…

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Catherine Frammery pour Le Temps
Parler comme jamais – écriture inclusive : pourquoi tant de haine ?
Tribu – le langage inclusif