Aus den Fugen, en point d'orgue…

Sulzer Alain Claude, Une mesure de trop , Actes Sud, Babel 2013.

Point d'orgue, c'est le titre français que l'auteur aurait aimé pour son roman. Le nom étant déjà utilisé, c'est paradoxalement un intitulé suggérant un ajout qu'il a choisi alors que l'acmé du livre est l'interruption soudaine du récital de Marek Olsberg : Une mesure de trop.

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Le pianiste a choisi un programme prometteur et a sélectionné un piano permettant de mettre en valeur les partitions et sa technique. Participer au concert de cet artiste adulé, au faîte de sa gloire, est une occasion rare de partager un événement qui a le potentiel de faire vivre un moment de bonheur intense.

Rien n'était aussi attirant que sa célébrité, rien n'était aussi séduisant que l'affection et les ovations d'un public fou de lui. Le public l'aimait. Ils aimaient Olsberg. Mais l'aurait-il aimé sans son public ? Pouvaient-ils durablement aimer celui dont ils allaient, tôt ou tard, exiger cet amour qu'il ne pouvait, au fond, donner qu'à son piano ?

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L’intérêt pour la musique des 15 personnes dont Sulzer détaille la soirée est limité. Elles sont davantage motivées par des considérations sociales. Les plus chanceuses pourront parader au buffet que les Bentz organisent ensuite dans leur somptueuse résidence. Les plus blasées envisagent de laisser leur siège vide pour éprouver d'autres sensations.
Quelles que soient leurs attentes, les protagonistes planifient leur mise en scène. L'entrée sur l'estrade de Marek Olsberg est elle aussi convenue; suivant un rituel bien rodé il s'apprête à faire face le public de la Philharmonie. La tension dramatique qu'insuffle Sulzer converge vers ce point de rencontre.

Que s'est-il passé ? Qu'est-ce qui avait déclenché cet événement ? Pourquoi ce genre de chose n'arrivait-il jamais ? Trois questions qui restaient en suspens parmi beaucoup d'autres et auxquelles personne n'était capable de répondre.

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Le public et l'artiste obéissent à des règles implicites. Bien que docile, le public n'est pas entièrement ouvert aux émotions pour lesquelles il a pourtant payé fort cher. Alors que ce sont les accords enchaînés par Olsberg qui devaient les faire vibrer, c'est le silence qui va mettre les protagonistes en mouvement et leur permettre d'envisager d'autres perspectives.
On retrouve dans l'intrigue de Sulzer, le thème de l'homosexualité, des constellations familiales (Une autre époque) et celui de l'ordre social (Un garçon parfait). Alors que le roman raille les m'as-tu-vu dans les salles de spectacle, l'éloge des cuirs Atelier Renard ajoute une étrange note discordante.

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Entretien avec Marlène Métrailler pour RTS
Eléonore Sulser pour Le Temps
Julien Burri Pour Payot–L'Hebdo