Le défi de Jérusalem
Récit initié par le Vatican, ce carnet de voyage en Israël sur les pas du Christ met en évidence une tension entre le monde intérieur et une réalité plus confrontante. L'appropriation par les diverses dénominations des lieux où Jésus aurait passé mise en concurrence avec les mémoires juive et musulmane ne suffit pas à éteindre l'élan mystique de l'auteur.
Jérusalem me jauge à son tour. Ce n'est plus moi qui l'examine, c'est elle qui m'observe. « Te voilà chrétien, souffle-t-elle, cependant tu aurais pu demeurer athée, voire, selon les caprices de tes déplacements, baigner dans la civilisation juive ou musulmane. Relativise un peu. »
Par réflexe, je me cabre. Relativiser ? Non ! Je m'insurge contre sa semonce. Rien ne s'équivaut. Même quand elles parlent d'un seul Dieu, les religions se distinguent.p. 144

Lorsqu'on naît israélien ou palestinien, on choisit vite son clan, car par le sang, les fêtes, les souvenirs, parfois par le deuil et le chagrin, on se rattache à une communauté. J'ai néanmoins rencontré des Israéliens et des Palestiniens choqués par ce conflit qui a pris leur pensée en otage; ils souffrent de ne pouvoir introduire des analyses, peser le pour et le contre, inaugurer un espace de dialogue, donc de partage. Sous la haine de l'autre se tapit toujours une aversion fondamentale: le refus de la complexité. Les apporteurs de nuances, ceux qui perçoivent la tragédie et ne la balaient pas au moyen d'un choix partisan, tiennent une position difficile: ces écartelés se révèlent inaudibles, promptement traités d'anti-Arabes ou d'antisémites.
p. 88
Cette retenue est d'autant plus décevante que l'auteur, conscient de sa notoriété, se réjouit d'avoir pu rendre compte de son expérience spirituelle au pape François, sans aborder les enjeux d'une coexistence pacifique.
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Jérusalem : capitale spirituelle, avec Vincent Lemire et Eric-Emmanuel Schmitt